Publications INSPQ-Québec: Analyse des enjeux éthiques liés à la taxation des boissons sucrées

Un rapport de Simone Santerre, INSPQ, disponible en ligne.

Résumé:

Le présent document est le fruit d’une collaboration entre l’Équipe-conseil en éthique et l’unité Habitudes de vie de l’Institut national de santé publique du Québec (INSPQ), visant à évaluer les enjeux éthiques de la taxation des boissons sucrées comme stratégie pour prévenir la surconsommation de ces boissons. La taxation fait partie d’un portefeuille d’actions envisagées pour la prévention de l’obésité et la promotion des saines habitudes de vie au Québec.

Actuellement, la prévalence élevée du surpoids et des maladies chroniques qui y sont associées compromet la santé des Québécois, en plus de générer des coûts économiques et sociaux importants. La consommation régulière de boissons sucrées étant comprise comme un facteur déterminant dans le développement de l’obésité, du diabète de type 2 et de la carie dentaire, la réduction de la consommation de ces boissons est envisagée comme une piste d’action à considérer au Québec.

La taxation des boissons sucrées est recommandée par l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), notamment car il s’agit du moyen le moins coûteux de réduire la consommation de ces boissons. Dans la littérature, la taxe figure parmi les mesures les plus rapides et les plus efficaces à instaurer dans la lutte contre les maladies chroniques et l’obésité.

Bien que motivée par l’amélioration de la santé de la population, l’imposition d’une taxe représenterait cependant une contrainte sur la liberté de choix car elle irait inévitablement à l’encontre du gré d’une partie de la population concernée par la mesure. L’imposition d’une telle taxe sur certains produits pourrait être perçue comme étant paternaliste mais pousserait également les consommateurs à être plus critiques dans leur choix de consommation.

Une taxe à taux fixe impose toutefois par défaut un fardeau plus lourd chez les moins nantis. Le caractère inéquitable de la mesure semble donc aller à l’encontre de la mission du gouvernement de réduire les inégalités sociales en santé. Or, cet effet indésirable semble potentiellement compensé par le fait que les plus grands consommateurs de boissons sucrées, une minorité surreprésentée dans les sous-groupes socioéconomiques les plus vulnérables de la population (c’est-à-dire les jeunes de moins de 25 ans, les personnes à faible revenu disponible, les personnes à faible niveau d’éducation et les peuples autochtones), auraient le plus à gagner en termes de bienfaits pour la santé.

Des solutions efficaces sont toutefois proposées dans la littérature pour pallier aux possibles effets négatifs de la taxe. Entre autres, il est suggéré d’utiliser une partie des revenus générés par la taxe pour réduire le prix de vente d’aliments sains, afin d’en favoriser la consommation. La subvention de fruits et légumes frais est en effet conseillée comme complément d’action équitable pour l’amélioration de l’alimentation au sein de la population, en plus de contribuer à la lutte contre l’obésité et les maladies chroniques qui y sont associées.